REFUGE

REFUGE


REFUGE, 2021

Tirage numérique, 40x60cm

Production Ville d’Anglet – Centre d’art contemporain La Villa Beatrix Enea

Il existe dans le travail de Séverine Hubard, y compris parfois jusque dans ses installations monumentales, une certaine forme de discrétion qui révèle d’autant plus l’efficacité de ses créations. Passant presque inaperçu, le panneau « Refuge », repris de la signalétique indiquant les abris lors du dernier conflit mondial, s’amuse de son positionnement ironique. Certes, la Villa Beatrix est un bien bel écrin – refuge – pour les œuvres présentées, mais il n’offre qu’un abri symbolique. Le tirage numérique, quasi clandestin, interroge avec force notre besoin constant de protection, demande de quelles batailles nous cherchons à nous prémunir. Et si finalement, à l’inverse, c’était l’artiste elle-même qui sollicitait un repaire paisible, loin du bruit du monde, sollicitant le visiteur à venir partager sa quête ? Un peu d’hospitalité pour l’esprit, un asile pour le rêve et l’évasion.

Do you want to be part of a world of sleeping people ? 2021

Production Ville d’Anglet – Centre d’art contemporain La Villa Beatrix Enea

Miroir, 93 x 145 cm

La citation, que nous pourrions traduire par « Est-ce que vous voulez faire partie d’un monde de gens endormis ? » est extraite d’un texte de l’artiste, musicien.ne et écrivain.e Genesis Breyer P-Orridge. La figure iconique de la musique industrielle et chef.fe de file du mouvement « pandrogyne » exhortait alors le lecteur à réagir, à ne pas se laisser passivement dominer par toute forme d’autorité, qu’elle soit politique, religieuse, sociétale ou qu’elle prenne la forme lénifiante d’une vie monotone. En inscrivant cette phrase sur un miroir – tel un cri gravé, ou une empreinte se révélant magiquement à la surface -, Séverine Hubard nous repose la question en nous mettant frontalement face à nous-mêmes. L’art doit nous questionner, nous déranger dans nos certitudes et habitudes, nous amener à réfléchir au sens de la vie. Il devient le reflet de la volonté de l’artiste, partagée dans nombre de ses œuvres, de se faire acteur social, de réveiller les consciences assoupies.

Have you got any matches ? 2002

REFUGE, Centre d’art contemporain La Villa Beatrix Enea

Bois d’allumage, approximativement 5 000 chevilles, dimensions variables

« N’auriez-vous pas des allumettes ? » nous interroge l’artiste d’un ton facétieusement provocateur. L’installation d’envergure est composée de centaines de petites sections de bois d’allumage, n’attendant donc qu’une étincelle pour prendre feu et rabattre les cartes. Grouillantes, envahissantes, s’immisçant dans les coins les plus reculés ou inaccessibles, les constructions semblent s’animer comme d’étranges animaux mus par un hypothétique instinct incendiaire. Derrière la pensée jubilatoire de pouvoir tout brûler, et tout recommencer, se cachent les mythes de purification par le feu, les flammes ardentes de la création, le grand incendie rituel qui annonce des jours meilleurs. De nouveau, Séverine Hubard s’empare de matériaux simples, basiques, pour créer des œuvres débordant l’imaginaire, qui se tiennent sur un fil tendu, un entre-deux, en attente ici du Grand Soir.